Ce rapport est produit par OCHA RDC en collaboration avec les partenaires humanitaires. Il couvre la période du 1er au 31 août 2024.
FAITS MAJEURS
- Quatre personnes déplacées tuées dans les sites autour de Goma en août 2024
- Au moins six sites des déplacées touchées par l’épidémie de Mpox autour de Goma
- Poursuite des affrontements armés dans les territoires de Masisi, Rutshuru et Lubero
CHIFFRES CLÉS
2,40M personnes déplacées internes au Nord-Kivu, (Source : CMP Nord-Kivu, août 2024)
1,51M personnes retournées au Nord-Kivu, (Source : CMP Nord-Kivu, août 2024)
2,73M personnes en insécurité alimentaire, IPC3+ (Source : Analyse IPC de l’insécurité alimentaire aigue juillet 2023-juin 2024)
APERÇU DE LA SITUATION
Territoire de Masisi
De nouveaux affrontements ont été signalés entre le 20 et le 25 août 2024. Ces affrontements entre les FARDC et un groupe armé non-étatique le long des axes Kisuma-Kaniro et Lushebero-Muheto, zone de santé de Masisi, se sont propagés vers le chef-lieu du territoire, où plus de 20 000 personnes déplacées vivent dans des sites. Selon une évaluation réalisée du 29 juillet au 4 août par la Croix-Rouge locale, plus de 38 500 personnes déplacées depuis fin juillet 2024 à Bisihe et Kahira pourraient se déplacer à nouveau, si ces affrontements persistaient.
Des affrontements se sont poursuivis également dans la zone de santé de Mweso, notamment sur l’axe Kirumbu-Mpati, depuis le 8 août. Ces combats ont entraîné de nouveaux déplacements de population. Les chiffres exacts restent à confirmer. La récurrence des combats depuis début juillet 2024 rend difficile l’accès humanitaire à plus de 43 000 déplacés vivant dans des sites sur cet axe.
Sur l’axe Sake-Kitshanga, des braquages de véhicules obligent plusieurs humanitaires à restreindre leurs mouvements sur cet axe. Le 16 août, un braquage d’un véhicule privé a occasionné la mort d’une personne à Kimoka. De plus, un convoi humanitaire a été bloqué pendant plus de 15 heures par un groupe armé à Mushaki le 15 août. Depuis le début de l’année, au moins neuf incidents ciblant les humanitaires ont été recensés dans le territoire de Masisi, notamment sur l’axe Sake-Kimoka. De plus, un groupe armé a récemment exigé aux ONG d’obtenir une accréditation avant toute opération dans les territoires sous son contrôle. Plus de 500 000 personnes déplacées vivant actuellement dans le territoire risquent d’être isolées de l’assistance humanitaire, selon la Commission de Mouvement de Population.
Territoire de Rutshuru
Des affrontements persistants entre groupes armés ont eu lieu dans les chefferies de Bwito et Bwisha, territoire de Rutshuru, malgré le cessez-le-feu en vigueur depuis le 15 juillet 2024.
Le 2 août 2024, des combats ont fait cinq civils tués et une dizaine de blessés sur l’axe Kinyandoni-Ishasha, selon des sources médicales locales. Près de 26 000 personnes auraient fui à la suite de ces affrontements vers les localités de Kinyandoni, Nyamilima et Ishasha. Certains se sont réfugiés de l’autre côté de la frontière en Ouganda. Bien que la majorité des personnes déplacées aient commencé à retourner depuis le 4 août, de nouveaux combats qui ont eu lieu le 22 août dans les localités de Katanga et Kigaligali ont occasionné le déplacement de plus de 30 000 personnes vers Kiseguru, Katwiguru et Kinyandoni. Ces personnes déplacées hésitent encore à retourner dans leurs zones d’origine en raison des risques de nouveaux affrontements.
Le 14 août 2024, des affrontements dans les villages de Runzenze, Kabingu et Kasali ont fait au moins neuf civils tués et plus de 4 000 personnes déplacées vers Kagando. Ces déplacés ont urgemment besoin d’une assistance en vivres, éducation, eau, hygiène et assainissement. Médecins Sans Frontières (MSF) et Action Contre la Faim (ACF) apportent leur soutien respectivement en santé et en nutrition dans cette zone. Des besoins restent non couverts dans plusieurs secteurs.
Malgré cette situation, des retours de populations déplacées sont observés, notamment dans la zone de santé de Kibirizi. Une évaluation réalisée le 5 août 2024 par l’ONG CONCERN fait état de14 211 ménages qui sont retournés dans la localité de Nyanzale entre avril et juillet 2024. L’accalmie relative observée sur place semble avoir motivé leur retour. En revanche, près de 4 000 ménages déplacés sont restés à Nyanzale en raison des combats dans les groupements de Mutanda et Kihondo. Les déplacés et les retournés ont un besoin urgent d’assistance en eau, hygiène et assainissement, éducation et intrants agricoles.
Territoire de Lubero
Le contexte sécuritaire reste très volatile dans le territoire de Lubero, avec des déplacements continus de populations. Le 30 août, au moins cinq civils ont été tués lors d’une incursion de présumés ADF dans le site minier d’Ata Ndele, près de Mangurejipa. Une personne a également été blessée. Cette attaque intervient après deux semaines d’accalmie dans le nord du territoire de Lubero. Le risque de nouvelles violences reste élevé.
La situation est aggravée par des rivalités entre des groupes armés qui se battent pour le contrôle des localités, ainsi que des attaques contre les civils. Le 3 août 2024, les autorités coutumières de la chefferie des Baswagha ont demandé le départ de tous les groupes armés, affirmant que leur présence contribue à l’insécurité croissante dans la localité.
Dans le Sud Lubero, de nouveaux combats entre l’armée congolaise et un groupe armé à Kikuvo ont été signalés le 25 août, avec le déplacement de plus de 30 000 personnes vers Kamandi Lac, Lunyasenge, Taliha et Lubango. Le risque d’extension des violences vers d’autres localités autour de Kikuvo sont considérés comme élevés.
Le 27 août, une explosion de grenade a tué trois civils et deux blessés graves à Kikuvo. Les victimes ont manipulé cette grenade par ignorance. Les blessés ont été admis à l’hôpital pour des soins médicaux. Depuis juin 2024, une prolifération d’engins non explosés est observée dans la zone de santé de Kayna, conséquence directe des conflits armés dans cette zone.
Territoire de Beni
Les attaques des groupes armés contre les populations civiles restent persistantes. Le 10 août, des hommes armés présumés ADF ont attaqué les villages de Mukoni, Mebundu, Maese et Baeti. Ils ont tué 18 personnes et enlevé 14 autres, selon la société civile locale. Des habitations ont été incendiées. Une semaine plus tôt, le 3 août, des combats à Kyavisogho et Mbilinga ont contraint de nombreux habitants à fuir vers Maboya, Kalunguta et Kabasha.
Le 12 août, une nouvelle attaque à Mamove a également contraint les populations à fuir vers Oicha. Cette attaque est survenue moins d’un mois après une autre qui a fait 15 morts dans les villages environnants de Mamove. En réponse à cette escalade de violence, les armées congolaise et ougandaise se sont déployées sur l’axe Mamove-Beumanyama pour protéger les civils contre les attaques.
Ville de Goma et territoire de Nyiragongo
Depuis plusieurs mois, des incidents liés à la présence d’hommes armés compromettent la sécurité des civils dans les sites de déplacés autour de la ville de Goma et dans le territoire de Nyiragongo.
En août 2024, plusieurs attaques meurtrières ont eu lieu dans les sites de Rusayo 2 Extension et Rusayo 1, faisant plusieurs victimes parmi les populations déplacées. Le 20 août, deux personnes ont été tuées par balle lors d’une incursion armée sur le site de Rusayo 2, lors de laquelle des abris ont également été pillés. Le 25 août et le 28 août, deux autres personnes, dont un enfant de 12 ans, ont perdu la vie dans des incidents similaires survenus à Rusayo 1.
Le 7 août, une organisation humanitaire a dû suspendre temporairement ses activités de fourniture d’eau dans le site de Lushagala, à la suite du braquage de ses volontaires par des hommes armés. Au total, trois incidents similaires ont été rapportés au cours des trois derniers mois, affectant sérieusement l’accès à l’eau potable pour les personnes déplacées.
Ces violences contre les civils dans les sites de déplacés compromettent gravement leur protection et leur sécurité. Elles violent par ailleurs le caractère civil de ces sites, qui devraient être exempt de toute présence ou activité militaire. En dépit des plaidoyers répétés des acteurs humanitaires, la détérioration continue du contexte de sécurité reste un défi majeur pour la protection des personnes déplacées.
Mise à jour sur l’épidémie de Mpox
Selon le récent rapport épidémiologique publié par le ministère de la Santé daté du 1 septembre 2024, 132 cas confirmés de Mpox ont été identifiés dans la province du Nord Kivu sur 535 échantillons cliniques analysés en laboratoire. Aucun décès de cas confirmé de Mpox n’a été notifié à ce stade.
À la fin du mois d’août, six sites de déplacés ont notifié des cas actifs, notamment les sites de Don Bosco, Mudja, Bushagara II, Bujari, Kanyaruchinya et Munigi. Les équipes de surveillance épidémiologique mènent des investigations sur le terrain et font le suivi des contacts afin de circonscrire la chaîne propagation du Mpox. Au total, 609 contacts ont été répertoriés, dont 505 (soit 82,9%) ont pu être retrouvés et suivis médicalement.
La rentrée scolaire du 2 septembre 2024 suscite de vives inquiétudes par rapport aux risques de contamination du Mpox en milieu scolaire, en raison de la promiscuité dans les écoles qui pourrait accentuer la transmission du virus parmi les enfants. À l’heure actuelle, les mesures d’encadrement et de prévention dans les établissements scolaires demeurent insuffisantes.
Territoire de Walikale
Bien que l’accalmie se consolide dans le territoire de Walikale, la présence persistante de groupes armés locaux reste un défi majeur pour la sécurité de la population. Le 17 août, des affrontements entre deux groupes armés dans le village de Langira, quoique de faible intensité, ont créé un mouvement de panique, sans pour autant entraîner de déplacements massifs. La population continue de subir l’imposition de taxes illégales aux points de passage, malgré les efforts de démantèlement par les autorités locales.